El Carnaval en La Florida
Je reviens du Carnaval, moi aussi. Et j’y retourne dans quelques heures, et mercredi. Le Carnaval ici est ce qu’il devrait être, la fête de la viande, de la carne. La fête du Carnaval c’est le festival des excès avant le Carême. Tout est permi. Au Moyen-Âge c’était l’occasion pour les pauvres de mettre le monde à l’envers, de se moquer des riches et du Roi et de dénoncer leur condition. Cette tradition ne s’est pas perdue en Équateur.
La radio organise depuis 9 ans un concours de « couplets carnavalesques » qui consiste en des chansons avec le même rythme et les même instruments mais les paroles sont à la discrétion des participants. Les instruments sont un petit tambour et 2 guitares. Un des groupes a utilisé une mélodica. La flute de pan est aussi un must. Cette tradition vient des Andes, de la province de Bolivar (nom surprenant n’est-ce pas ?) et s’est transmise à l’Oriente équatorien grâce à l’immigration. C’est bien le seul festival musical où le costume de cérémonie inclut des bottes en caoutchouc. Les artistes portent leurs bagages sur eux pendant leur prestation et se barbouille le visage de poudre blanche. Le spectacle a eu lieu dans le quartier de La Florida à 10 km de Lago Agrio. Les spectateurs montés sur les toîts de pick-up ou dansant se saoulent à l’alcool de canne. Cette boisson est tellement forte qu’avec un demi-shooter le sourire est assuré et avec un shooter on comprend instantanément ce que Einstein voulait dire lorsqu'il disait que l’espace et le temps sont courbes. La nourriture consiste en un espèce de pain de maïs cuit dans des feuilles, pas mauvais du tout. Et la chose est éminament politique. Voici la copie des paroles d’une des chansons. Je vous rend une traduction approximative par la suite. Les erreurs d’orthographe sont des auteurs mais ça ajoute au charme.
Coplas Carnabaleras
Ablar de las petroleras es un dolar de cabeza,
Se lleva nuestra riqueza y dejan solo pobreza,
II
El Presidente Palacios y el grupo febrescordero
Como engatuza ala jente polvono cafetalero
II
La politicá ya biene muchachos analisar por
Llegar asta el poder seguirán hasta matar,
II
El paro Biprovincial dejo mucho de que hablar
El ministro de defensa nos ha mandado a matar,
II
Ay Sucunbios ay Orellana
Adios la oxi adios en cana.
Duo Coloma Coloma
Une rapide traduction des bouts les plus intéressants :
Parler des pétrolières est un mal de tête,
Ils se poussent avec nos richesses et laissent seulement de la pauvreté
II
La grève-soulèvement biprovincial a laissé beaucoup de quoi parler
Le ministre de la Défense a envoyé pour nous tuer
II
Il y a Sucumbios, il y a Orellana
Adieu OXY, adieu Encana
La grève-soulèment a eu lieu en août dernier où les populations des provinces de Sucumbios et Orellana se sont révoltés contre l’État et les compagnies pétrolières. Le gouvernement a envoyé l’armée et a fermé notamment la radio où je travaille.
OXY signifie Occidental Petroleum, une multinationale américaine détestée de tous qui exploite le pétrole dans l’Amazonie.
EnCana, c’est bien sûr un fleuron de l’économie albertaine qui pollue autant que les autres.
Ce Carnaval m’a un peu réconcilié avec la mission de la radio. Les coplas carnavaleras et l’émission La Vida de los Puebos servent vraiment les communautés. La Vida est une visite hebdomadaire d’une communauté pour prendre des informations sur la vie des habitants. Les équatoriens, particulièrement les communautés autochtones étant très réfractaire à toute forme de recensement de l’État (historiquement sinonyme de davantage de taxes et corvées), la radio met donc les communautés en lien avec ceux et celles qui peuvent répondre à leurs besoins sans crainte de répression de la part du patrón ou de l’État
Si vous voulez avoir des merveilleuses discussions passionnées via msn mon nom est quoiquelenoirsoitleplusbo@hotmail.com
En lire plus!